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LA CRONICA MUNDI
la Germanie ! Quelles grâces lui rendra l'Eglise, quelle fête
célébrera toute la société chrétienne ! Les rois du Septentrion
et de l'Occident le salueront à son retour du nom de grand
empereur et de sauveur de la république chrétienne. Les
cardinaux, tous les prélats de l’église, les magistrats des
villes, portant les objets sacrés, sortant loin en avant des
murs, iront au-devant d’eux… Toute la terre que devront fou-
ler ses pieds sera couverte de pourpre ; les nobles matrones
et les vierges sèmeront sur lui, du haut des maisons, les
roses et les lys et enlaceront à sa tête sacrée des guirlandes
de fleurs variées. Lui-même, élevé sur son char, jettera au
peuple des pièces d’or, dans toutes les places, dans tous les
carrefours où il s’arrêtera… Et ainsi triomphant, il sera
conduit, non dans le Capitole et dans le temple du faux dieu
Jupiter, mais dans la Basilique du bienheureux Pierre, prince
des apôtres. Et là, trouvant le souverain pontife, Alexandre VI,
véritable vicaire du Christ, tenant les clefs du royaume éter-
nel, il recevra de lui une large bénédiction. Alors la muse
laurée du poète Conrad Celtes reviendra pour ainsi dire des
enfers et composera des poèmes ; Antonius Sabellicus écrira
son histoire. Nous aussi, si nous pouvons faire entendre
notre voix au milieu des Cygnes, nous trouverons quelque
chose à raconter à la postérité sur un si grand roi. » Et
après ce dithyrambe, l’auteur prend un premier congé du
lecteur en ces termes :
« Hec habuimus que per ociû Nurembergense adjiceremus.
Vos valete et boñ consulite, ex Nuremberga x kal’as Junias.
Anho ab incarnatione salvatoris Christi millesimo quadringen-
‘esimo nonagesimo tercio. »
Au dessous, en lettres capitales HA. S. D, Il avertit
ensuite le lecteur qu’il a laissé quelques feuillets blancs pour
qu’on puisse y écrire les actions des princes et des particu-
liers à venir, car, dit-il modestement, non omnia Possumus
omnes. Et quandoque bonus dormitat Homerus.