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LA CRONICA MUNDI
approfondie permet d’attribuer la paternité de certaines
compositions à Wolgemut et celle de certaines autres
à Pleydenwurff, et il estime que cette répartition n’est pas si
difficile qu’elle l’a semblé jusqu'ici : « Je crois, dit-il, que
pour ce qui concerne l’esprit, le sentiment et la conception
de la forme, on reconnaît distinctement que deux natures
douées, au point de vue artistique, de qualités très différentes
ont pris part à l’œuvre : l’une insipide, rude et sans esprit ;
l’autre avec un sens prononcé de la finesse, du charme, de
l'expression poétique. Et il ne s’agit pas seulement ici d’une
différence qu’on peut mettre sur le compte du tailleur sur
bois, mais d’une différence de style. On peut établir aisément
la part de dessins afférente à Wolgemut: quand on feuillette le
lourd volume, l’œil est frappé par plusieurs bois de dimen-
sions plus grandes qui trahissent sans hésitation la paternité de
Wolgemut ; je signalerai avant tout la composition du Christ
et des douze apôtres (fol. cr verso de l’édition latine), le
Jugement dernier (fol. ccLxv verso) et les scènes de la Création
(fol. 1 à vrr) à l’exception de l’Assemblée des anges (fol. 11).
Si on se grave bien dans l'esprit les caractères distinctifs, on
reconnaîtra le dessin de Wolgemut dans la majeure partie
des grandes compositions à figures et dans la plupart des
personnages isolés. Avant tout c'est la forme de la main qui
doit compter pour un indice décisif, cette forme allongée des
doigts qui s’étendent avec raideur à partir du plat central de
la main, ceux du milieu étant juxtaposés droits et fermes,
tandis que l’auriculaire, rigide, est séparé d’eux. Nous avons
sans doute affaire à des mouvements de mains différents;
mais le type dominant est celui que nous venons d'indiquer.
Quiconque a étudié d’un œil exercé la forme des mains dans
les peintures de Wolgemut pourra avec quelque attention
la reconnaître ici. Et les types désagréables, rudement
dessinés des peintures, se répètent en dimensions plus petites,
mais encore plus grossiers : la rudesse du tailleur sur bois
arrive jusqu’à en faire une véritable charge.